Oraison à notre Seigneur Jésus-Christ - Charles Drelincourt
Seigneur Jésus, qui du plus haut des cieux regardes nos misères, jette les yeux de tes compassions sur moi ta pauvre créature, qui te réclame dans son angoisse. Mon péché me fait horreur. Et c’est un fardeau qui m’accable. Ma conscience me sert de témoin, de juge, et de bourreau. J’ai offensé la Majesté divine. Et je sais que c’est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu Vivant, et que Dieu est un feu consumant. J’ai tant de fois abusé de ses grâces, que je crains d’être jeté avec le lâche serviteur aux ténèbres de dehors, là où il y a des pleurs et des grincements de dents.
En cet état lamentable, à qui irai-je, Seigneur, sinon à toi qui a les paroles de vie éternelle ? Aurai-je mon refuge aux saints, et aux martyrs ? mais il n’y a point assez d’huile dans leurs lampes, pour eux et pour moi. Et ils ont eux-mêmes lavés et blanchi leurs robes dans le sang de l’Agneau. Aurai-je recours à la vierge bienheureuse ? mais elle te magnifie elle-même comme son Seigneur et son Dieu, et elle se réjouit en toi comme son Sauveur. M’adresserai-je aux anges ? mais il n’y a point de salut en aucun autre que toi. Et il n’y a point d’autre nom qui soit donné aux hommes par lequel il nous faille être sauvés.
Seigneur Jésus, tu es mon unique espérance. J’ai péché, mais tu es mon Avocat envers Dieu le Père, la propitiation pour mes péchés. Mon salut et ma vie est dans tes mains. Car toute puissance t’a été donnée au ciel et sur la terre. Je sais que tu as le pouvoir de pardonner les péchés. Et que tu as répandu assez de sang pour racheter les iniquités de tout le monde. J’ai encore moins de sujet de douter de ton amour et de ton affection pour me sauver. Tu m’en as donné des gages très certains. Car étant vrai Dieu éternel avec le Père, tu as dépouillé pour un temps les rayons de ta gloire, et tu t’es revêtu de notre nature infirme. N’estimant point comme une usurpation d’être égal à Dieu, tu t’es anéanti toi-même jusqu’à prendre la forme de serviteur, et tu as été obéissant jusqu’à la mort, même à la mort ignominieuse de la croix. Croix en laquelle tu as expié nos péchés, soutenu la colère de Dieu, et satisfait pour sa justice, tellement qu’il n’y a plus de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ.
Que si lorsque j’étais ton ennemi, esclave de Satan, adjugé aux enfers, tu es mort pour moi et ne m’as point épargné ton propre sang, maintenant que je suis ton serviteur, ton ami, ton frère, et l’un des membres de ton corps mystique, ne serais-je pas sauvé de la colère de Dieu, par ta vie et par ton intercession ?
Mon Seigneur et mon Dieu, je serais bien misérable et bien infidèle, si je ne m’attendais à cette grâce et faveur divine. Car tu nous appelles à toi, avec une douceur et une débonnaireté admirable, promettant de donner la paix et le repos à nos âmes. Tu es venu sauver ce qui était perdu. Et non seulement tu nous a mérité le salut, mais aussi tu as voulu en être le héraut*. Car au son de l’Évangile, qui a retenti par tout l’univers, tu as publié les grands pardons, et l’entière abolition de tous nos crimes.
Dans la loi qui n’avait que l’ombre des biens à venir, et non pas la vive image des choses, l’esclave sans payer aucune rançon était mis en liberté l’année du jubilé. Et ceux qui avaient vendu ou aliéné leurs héritages, rentraient pour néant dans leur première possession. En ce temps de grâce et de miséricorde, beaucoup plutôt serai-je mis dans la liberté des enfants de Dieu, puisque tu t’es donné toi-même en rançon pour moi, beaucoup plutôt rentrerai-je dans la possession de l’héritage incorruptible de gloire, vu que tu me l’as racheté, non point par des choses corruptibles, comme par l’argent ou par l’or ; mais par ton précieux sang. Seigneur Jésus, tes liens ont acquis ma liberté, ta condamnation est mon absolution, ta malédiction me bénit, ta mort m’a rendu la vie, et ton sang me nettoie de tout péché.
Lavé dans ce précieux sang, enveloppé de ta mort, appuyé sur ta croix, et revêtu de ta justice, je ne craindrai ni Satan, ni le monde, ni les enfers. Je comparaîtrai avec assurance devant le trône du Dieu vivant. Car si tu me justifies, qui est-ce qui me condamnera ? Puisque tu es mort pour mes péchés, et ressuscité pour ma justification, et que tu intercèdes pour moi dans le sanctuaire céleste, rien ne me séparera jamais de ton amour. Rien ne me ravira de ta main. Tu m’as donné ici bas sur terre des témoignages de ton amour, et m’as fait sentir et savourer la douceur de ta grâce, et là-haut au ciel tu me feras jouir de la grandeur de ta gloire, et tu m’abreuveras au fleuve de tes délices.
Sauveur du monde, qui m’as été fait par Dieu, sagesse, justice, sanctification, et rédemption, comme tu m’as racheté par ta mort, et justifié par tes mérites, illumine-moi par ta vérité, et régénère-moi par ton Saint-Esprit, afin qu’étant affranchi de péché, je sois esclave de la justice. Que je te loue et te serve durant ma vie dans ton Église militante. Et qu’éternellement je puisse t’adorer et glorifier avec les milliers d’anges, dans l’Assemblée et Église des premiers-nés, qui sont écrits aux cieux.
Charles Drelincour
Prières et exhortation au jeûne et à la repentance.
(*) héraut : messager